Lancé par le ministère de l’Agriculture, le plan de souveraineté pour les fruits et légumes vise à donner un cadre stratégique et des leviers d’actions opérationnels afin que la filière fruits et légumes puisse inverser la tendance des courbes de production à horizon 2030, tout en répondant aux défis environnementaux et climatiques.

650 millions d’euros : c’est le déficit cumulé des légumes qui composent une ratatouille, selon un rapport publié en décembre dernier par le Haut-Commissariat au Plan et intitulé : « Reconquête de l’appareil productif : la bataille du commerce extérieur ». L’institution y dissèque la perte de compétitivité de notre agriculture et de toutes les filières industrielles.  Et s’agissant de la ratatouille, les cinq légumes qui la constituent sont dans le rouge, à commencer par la tomate (- 239,4 millions d’euros), suivie des poivrons (ou piments doux), des courgettes, des aubergines et des oignons. Un exotisme tout relatif. On pourrait y ajouter les 368 millions d’euros de déficit commercial de l’huile d’olive (2019).

Selon Agreste, le service statistique du ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, le déficit commercial de la France en fruits et légumes a atteint 3 milliards d’euros en 2021. Toutes filières confondues, les fruits et légumes frais remportent la palme du déficit, devant les produits de la pêche, le tabac, la viande, le chocolat et les confiseries.

Coûts de production, réglementation, sous-investissement

Sans surprise, sur des denrées exigeantes en main-d’œuvre, le coût du travail plombe les performances du secteur, malgré les dispositifs d’allègement tels que le Tode (Travailleurs occasionnels demandeurs d’emploi agricoles). Au coût du travail s’ajoutent le coût des intrants, à tous les niveaux de la chaîne (amont et aval) et les surcoûts induits par l’abandon de moyens de lutte chimique, auxquels se substituent des travaux manuels ou mécaniques plus fréquents et plus coûteux.

Avec les coûts de production, la réglementation est l’autre faiblesse de la filière en termes de compétitivité. La France développe un corpus réglementaire en matière d’exigences environnementales, à l’origine de distorsions de concurrence importantes au sein du marché européen. La règlementation environnementale nationale, privilégiant les hauts standards de production (bio, HVE, etc.), au détriment de produits génériques, faisant ainsi le lit des importations.

FranceAgriMer pointe aussi du doigt le manque d’investissements dans la recherche et l’expérimentation (notamment pour faire face à la perte des produits phytosanitaires), dans les outils productifs (parcs de serres, plantations de vergers, bâtiments de stockage de pommes de terre, etc.) afin de permettre aux filières de s’adapter au contexte national et international, d’améliorer les performances des exploitations et d’être en phase avec les attentes des marchés. Sur le sujet fondamental de la logistique, le bilan est mitigé. Les acteurs adressent un satisfecit au transport routier mais relèvent des difficultés de chargement sur les ports français et l’écart entre le coût et le service rendu en matière de fret ferroviaire.

 

Premières actions dès 2023

Et pourtant, la France dispose de réels atouts afin d’être davantage autonome et de sécuriser sa production de toutes les gammes de fruits et légumes, grâce à une grande diversité de territoires et de zones climatiques dans l’Hexagone mais également dans les territoires ultra-marins. Pour répondre à ses ambitions en matière de souveraineté alimentaire et pour déjouer cette fatalité qui n’en est pas une, le ministère de l’Agriculture vient de lancer un Plan de souveraineté dont les modalités et les premières actions sont attendues pour début 2023. D’ici là, professionnels et services concernés vont travailler de manière transverse sur les grands axes stratégiques, à savoir : la protection des cultures, la compétitivité, les investissements et l’innovation, la recherche, l’expérimentation, la formation et renouvellement des générations et enfin la dynamisation de la consommation de fruits et légumes dans le modèle alimentaire.

 

Bon à savoir

3 milliards d’euros : c’est le déficit commercial de la filière fruits en 2021. Il est de 743 millions d’euros pour les légumes (source : Agreste, le service statistique du ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire).

 

© Raphaël Lecocq – Uni-Médias – novembre 2022

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