Rien ne se perd, rien ne se crée tout se transforme !

Aymeric Rey – FERME EN PERMACULTURE (Condezaygues, 47) //

A 36 ans, Aymeric Rey a tout plaqué : sa vie citadine à Lyon, son job d’ingénieur dans l’industrie de la pétrochimie, ses journées cadencées pour créer une ferme en permaculture dans le Lot-et-Garonne. Un changement de braquet radical et une reconversion réussie, pour ce néo-agriculteur. Récit.

En 2018, Aymeric Rey a changé de vie, plaqué son métier et revu toutes ses priorités… Rien que ça ! Un coup de pied dans la fourmillière après 12 ans d’une vie bien remplie, en tant qu’ingénieur dans la pétrochimie, à Lyon. Sur le papier, Aymeric Rey a pourtant « tout pour être heureux » : un job de rêve, une vie bien remplie… Mais dans la réalité, un grain de sable vient gripper inexorablement la jolie mécanique. Sa vie avait-elle vraiment du sens ? « J’en était arrivé à être en conflit avec mes propres valeurs, alors j’ai décidé de tout recommencer à zéro ! » se souvient-il. En quête d’authenticité, le jeune trentenaire plaque tout. Direction : le Lot-et-Garonne, où il passait toutes ses vacances pendant son enfance.

Dans un premier temps, Aymeric Rey s’occupe des ruches que son père exploite en tant qu’apiculteur amateur. Mais très vite, l’ancien ingénieur comprend qu’il manque d’expérience terrain et décide alors de se professionnaliser en présentant un brevet professionnel de reprise d’exploitation agricole (BPREA). Une reconversion totale pour cet ex-ingénieur, qui n’hésite pas à « retourner sur les bancs de l’école » pour se former.

Permaculture, l’autre agriculture

Diplômé en 2019, Aymeric Rey retrousse ses manches, à la recherche d’une ferme arboricole.
Il trouve finalement la perle rare à Condezaygues, près de Fumel. Un vieux corps de ferme à retaper de fond en comble, mais qui offre de beaux projets à venir. Car Aymeric Rey a une feuille de route toute tracée : l’ancien ingénieur veut se reconvertir dans la permaculture. « La permaculture porte un regard durable sur l’agriculture et met en pratique la citation de Lavoisier : rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme ! En clair, dans un jardin, chaque déchet a son utilité et chaque plante favorise la santé de tout l’écosystème. Pas de monoculture ni de monotonie florale : la permaculture offre une multitude de techniques et d’approches ! »

Confusion olfactive et plantes de compagnie

Pommes, pêches, abricots, kakis, cerises… Aymeric Rey plante en 2020 son premier hectare de vergers, ponctué de petites haies fruitières (framboisiers, cassis myrtilles…) et de plantes de compagnie, comme la rue, le thym ou le romarin. Chez lui, pas besoin d’engrais ou de pesticides : la nature fait sa part. « Ces plantes ont des vertus naturellement protectrices ou répulsives, explique-t-il. Ce sont des barrières naturelles, qui jouent sur la confusion olfactive. En effet, certaines espèces odorantes perturbent les systèmes neurotransmetteurs des insectes ravageurs. » Autre bon point avec le thym, c’est un médicament naturel contre les acariens qui vivent dans les ruches. Dans une vision de développement durable, Aymeric Rey veille également à une gestion raisonnée de l’eau, en paillant le sol avec du bois issu de la coupe.

Eloge de la patience

Dès sa création, la ferme permacole d’Aymeric Rey a reçu un excellent accueil dans la région. « Il y a une vraie demande sur les marchés locaux, se réjouit Aymeric Rey. On sent une volonté de se tourner vers une agriculture plus durable et qui a du sens. On n’est pas dans une optique de rendement, mais dans l’éloge de la patience, en renouant avec les rythmes de la nature. » Des projets pleins les bottes pour l’année 2021, le jeune agriculteur compte bien planter un deuxième hectare, et doubler son nombre de ruches, passant ainsi de 25 à 50. Il entend également créer un atelier de transformation en vue de valoriser les fruits moches. « Une des idées reçues est de penser qu’un fruit moche perd toutes ses saveurs nutritives. Rien de plus faux ! Alors pour éviter l’énorme gâchis, j’envisage de construire un atelier dans la cave de la ferme, pour fabriquer des confitures, des jus de fruits… »

Miimosa : le financement participatif

Pour ce projet, Aymeric Rey a bénéficié en complément de son prêt bancaire, d’un financement participatif, sur la plateforme Miimosa, dont le Crédit Agricole est partenaire. « Nous l’avons orienté vers cette structure afin qu’il puisse bénéficier de bases solides pour concrétiser son projet, explique Luc Charbonnier, chargé d’affaires. Notre rôle, en tant que partenaire bancaire, est de trouver des solutions sur-mesure pour chaque client, et le dispositif Miimosa nous semblait particulièrement pertinent. Dédié à l’agriculture et à l’alimentation, la plateforme de crowdfunding compte 280 000 membres et a déjà permis le financement de 3 800 projets, pour 40 millions d’euros collectés. » Grâce à ce financement, Aymeric Rey envisage notamment d’installer une cuisine aux normes, avec sols carrelés et murs étanches.

Dans un deuxième temps, Aymeric Rey compte également créer un atelier de séchage, afin de valoriser toutes les plantes et aromates qui viennent protéger le verger, en les transformant en infusion, en huiles essentielles… « N’oublions pas non plus les poules ! conclut-il. Elles sont indispensables pour aérer la terre, la gratter et la débarrasser de ces petits vers : et en plus, elles donnent des œufs. » Quand on vous dit que rien ne se perd !

 

Les canards de Chalosse

Amélie et James Clayton ont repris une exploitation agricole en Chalosse, pour élever des canards gras en plein air. Avec la pandémie, le couple a dû imaginer de nouveaux moyens de distribution, et espère développer son activité au plus près de son territoire.

C’est en plein cœur de la Chalosse, qu’Amélie Clayton et son mari James ont repris une exploitation agricole en 2019, pour élever des canards gras. Une évidence pour Amélie, qui a toujours vécu au contact de la nature, auprès de parents agriculteurs-céréaliers à Orléans. « Après des études d’ingénieur agricole et de commerce-marketing, j’ai intégré une structure spécialisée dans la production de pommes-de-terre et d’oignons, » souligne Amélie Clayton. Alors que son frère reprend l’exploitation familiale, Amélie et son mari ont l’opportunité de s’installer à Misson (40).

Un village que James connaît bien, puisque sa famille, d’origine anglaise, a aménagé ici, quand il avait 14 ans. Après deux ans de passation avec les cédants pour apprendre l’élevage des canards gras et leur transformation, le couple se lance dans la production. « Sur notre exploitation de 70 ha, on gère tout de A à Z : la culture du maïs pour nourrir nos 3 800 canards en passant par celles du soja, du tournesol ou du colza, ou encore la production de blé pour le paillage. » Ici, les canetons sont élevés en plein air, sur un parcours herbeux et disposent de petites cabanes chauffées au démarrage.

Foie gras et axoa de canard

« Le Crédit Agricole Aquitaine, nous a suivis sur la totalité du projet, à titre personnel et professionnel, puisqu’il a financé le rachat des parts sociales, le foncier, la conserverie et même la ferme landaise. » D’une surface de 250 m2, la conserverie demeure le lieu stratégique de l’exploitation, puisque c’est ici que le couple prépare ses confits, gésiers, magrets fourrés au foie gras et autres plats cuisinés comme la garbure ou l’axoa de canard. « Nous vendons également des produits frais, magrets, aiguillettes, ou tournedos, souligne Amélie Clayton. La qualité de la viande passe par de nombreux critères comme l’alimentation, le plein air et une surveillance de tous les instants. »

Service livraison et site Internet

Pour l’heure, les produits de la ferme sont essentiellement vendus sur les marchés locaux, et le couple comptait sur les marchés de Noël pour limiter la casse des confinements successifs. « Il a fallu s’adapter avec l’annulation des marchés. Heureusement, nous avions développé un site Internet avec une filiale du Crédit Agricole Aquitaine, et nous expédions ainsi une partie de notre production. Nous avons également mis en place un service Livraison pour desservir une clientèle plus locale. » Malgré le contexte incertain, Amélie Clayton espère développer son activité, sans pour autant perdre en qualité. « Nous voulons rester une exploitation à taille humaine, en lien avec son territoire pour faire vivre l’économie locale. » https://www.bienvenue-a-la-ferme.com/nouvelle-aquitaine/landes/misson/ferme/ferme-escazaous/158821

Spiruline : l’émeraude des lagunes

Fatima Hamaidi et Arthur Floréan – LA FERME DE L’OR VERT (Bruges, 33) //

Ouvert en mars 2020, la Ferme de l’Or Vert, à Bruges (33) produit de la spiruline artisanale. Rencontre avec Fatima Hamaidi, qui a quitté sa vie citadine pour cultiver cet or vert avec Arthur Floréan.

Retenez bien ce nom : spiruline. Cette petite algue, qui pousse naturellement sous l’équateur, a tout d’une grande ! Riche en protéines, en vitamines et en fer, ce superaliment très nutritif, offre de multiples bienfaits à l’organisme. Et ce n’est pas Fatima Hamaidi qui dira le contraire ! « J’ai découvert la spiruline par hasard, confie-t-elle. Après des études de commerce, un poste d’attachée de direction et un autre dans une start-up, j’enchaînais les insatisfactions. Au bord de l’épuisement, on m’a conseillé de prendre de la spiruline, et en quelques semaines, j’ai vu les effets positifs sur mon organisme. »

Un marché prometteur

Loin d’en rester là, la jeune femme décide alors de tout plaquer pour se lancer dans la culture de cet or vert. « J’ai toujours été intéressée par les agricultures urbaines et le monde agricole. Alors, je me suis rapprochée de la Fédération des Spiruliniers de France (FSF) qui compte une centaine de fermes, et je me suis formée aux méthodes d’ensemencement et de récolte… » Comparée à la Chine et Hawaï qui fournissent 80 % du marché, la France fait figure de Petit Poucet. Pourtant, les perspectives sont prometteuses, et les spiruliniers français misent sur leur savoir-faire, pour se démarquer. « Les gros industriels utilisent des procédés de séchage ultra-rapide qui altèrent la qualité de la spiruline. Avec Arthur, nous souhaitions privilégier avant tout la qualité à la quantité. »

Première récolte en août 2020

Après un an de recherches, Fatima Hamaidi et Arthur Floréan posent finalement leurs valises à Bruges (33) et installent un bassin hors sol de 200m2. C’est dans cette eau peu profonde, au pH élevé (pH10), que la spiruline va se développer au rythme des saisons. « Nous avons choisi une souche qui provient d’une ferme Ecocert BIO à Montauban. Dans le bassin, nous avons recréé son biotope en veillant à brasser l’eau, et surtout à respecter le pH. » A la croisée de la micro-algue et de la bactérie, la spiruline va alors se multiplier et doubler de volume tous les 48 heures, sous l’effet du soleil. Aucun pesticide, conservateur ou additif : ici, tout est naturel.

La première récolte a eu lieu en août dernier, sous l’œil attentif de Fatima. L’algue, aussi fine qu’un cheveu, est d’abord tamisée dans plusieurs filtres, aux mailles de plus en plus étroites, jusqu’à devenir pâteuse. « Ensuite, on la presse pour enlever l’eau une dernière fois, puis on l’étire sous forme de spaghettis, avant de la mettre à sécher à basse température (40 degrés maximum) pendant 6 à 8 heures. Une fois le procédé achevé, on va la concasser pour obtenir les fameuses paillettes, à saupoudrer sur des plats salés ou sucrés. »

 

Objectif : 600 kg à l’année !

Aux côtés de ces deux jeunes agriculteurs, le Crédit Agricole Aquitaine a financé tout l’équipement : la serre de 1000 M2, le laboratoire, la presse sous vide, le séchoir professionnel, le tambour de récolte … « A ce jour, nous avons récolté 50 kg de spiruline, que nous vendons à la ferme et sur les marchés locaux. Dans un avenir proche, nous aimerions disposer de 4 bassins (soit 800 m2) pour récolter 600 kg à l’année. » Mais il faut être patient, car la spiruline suit le rythme de la nature et en hiver, elle hiberne…

 

Quand la ferme fait son beurre

Créée juste après le premier confinement, l’entreprise artisanale Lait Sœurs Douceurs s’est spécialisée dans la fabrication de beurres, crèmes et yaourts frais. Ici, tout est local et fait maison, du lait fraîchement tiré aux coulis qui parfument les crèmes glacées et les Skyr* ! Rencontre avec Aurélien Tastet, 33 ans, agriculteur et « yaourtologue » !

Dans le petit village de Tilh (40), les jours raccourcissent au rythme des saisons, annonçant l’arrivée imminente de l’hiver. Mais pour Aurélien Tastet et sa femme Amandine, les journées semblent toujours aussi longues. A la tête d’une exploitation agricole de 70 hectares, le jeune agriculteur a pris la relève de son père, désormais à la retraite. « La ferme, c’est avant tout une affaire familiale, confie-t-il.  Je suis né à Tilh, et j’ai toujours vécu au milieu des animaux et des champs de maïs. Mon père et son frère ont géré ensemble cette exploitation, jusqu’en 2019. Mais depuis un an, j’ai repris les rênes en m’associant avec mon oncle. »

Un laboratoire financé par le Crédit Agricole Aquitaine

Entre la quarantaine de vaches à la traite et le troupeau de 35 mères à s’occuper, Aurélien Tastet ne compte pas ses heures. Infatigable, il s’est même engagé dans une nouvelle activité : la transformation du lait fermier autour de 3 grandes gammes de produits : glaces, crèmerie et yaourts.
Lancée juste après le premier confinement, sa petite entreprise – Lait Sœurs Douceurs – a pu voir le jour grâce au Crédit Agricole Aquitaine qui a financé la création du laboratoire de 100 m2. A l’intérieur de cet antre du frais, une chambre froide ainsi que 2 salles de fabrication : l’une dédiée aux gros volumes (yaourts et glaces), l’autre au fromage frais et autres crèmes fraîches.

Skyr, baratte et crèmes glacées

Formé auprès d’un artisan glacier, Aurélien Tastet – qui a également suivi une formation sur les produits laitiers – sait que la recette du succès repose avant tout sur la qualité des ingrédients. Alors, chez lui, tout est local ou fait maison. Les fruits proviennent des fermes du coin, et le lait… de son exploitation bien évidemment ! Le jeune agriculteur table sur 25 000 litres de lait par an pour concocter ses crèmes fraîches, beurre à la baratte, crèmes glacées et… ses fameux Skyr ! Une spécialité laitière islandaise, entre le yaourt et le fromage frais, très en vogue en ce moment. Son secret de fabrication ? La qualité du lait, bien entendu, mais aussi le choix des ferments lactiques, qui jouent un rôle fondamental dans le développement des arômes. « Nous tablons sur la fabrication d’une tonne de Skyr par an et de 500 kilos de beurre à la baratte, détaille-t-il. Aujourd’hui, nous envisageons de diversifier les races de nos vaches, en sélectionnant des espèces plus rustiques – comme la Brune des Alpes ou la Jersiaise – qui donnent un lait plus riche en matières grasses. »

Bientôt, une boutique en ligne !

Côté distribution, Lait Sœurs Douceurs s’appuie sur les circuits courts, avec son point de vente à la ferme et la tournée des marchés locaux. « Dès la rentrée prochaine, nous allons livrer la cantine scolaire du village, et nous espérons également commercialiser nos produits dans plusieurs magasins de producteurs, conclut Aurélien Tastet.
Le couple compte également développer son site Internet ainsi que le Click and Collect, en s’appuyant sur les solutions développées par le Crédit Agricole Aquitaine. « Il faut savoir vivre avec son temps et le digital offre une belle visibilité ! »
Outre cette mini boutique en ligne, Aurélien Tastet envisage de créer de nouvelles recettes pour 2021, comme la faisselle de Tilh, ou le fromage frais à tartiner !

* Yaourt scandinave fabriqué à partir de lait écrémé et qui se travaille comme un fromage

Le bonheur est dans le pré

Loïc Destaillats – AGRICULTEUR (Monségur, 40) //

Depuis 2007, Loïc Destaillats, gère une exploitation agricole au cœur de Monségur (40). Fils et petit-fils d’agriculteur, il connaît le métier par cœur et voue un attachement profond à son terroir. Malgré la crise, il continue à investir et croit en une agriculture plus résiliente et raisonnée.

Octobre, fin des récoltes. Loïc Destaillats, agriculteur à Monségur (40) peut souffler un peu. Comme chaque année, la saison a été des plus intenses, et la Covid-19 a rajouté une nouvelle incertitude. Confinement, pénurie de main d’œuvre, climat capricieux… Rien n’aura été épargné aux agriculteurs de la région. « Depuis deux ans, on a tout connu : la grêle, les inondations, les orages et les fortes chaleurs, avoue Loïc Destaillats, un brin désemparé. Et maintenant, c’est le Covid ! Il faut tenir bon, mais cette pandémie jette un voile sombre sur l’avenir. Et puis, il faut l’avouer, le climat devient fou, et en tant qu’agriculteur, je redoute les séquences extrêmes de canicule et de pluie intense. »

Rubinettes et maïs semence

Enfant de la terre, Loïc Destaillats a toujours vécu au rythme des saisons, avec des parents et arrières-parents agriculteurs comme lui. Le sillon semblait donc tout tracé pour ce minot du terroir. C’est donc tout naturellement qu’en 2007, Loïc rachète une exploitation de 58 hectares non loin de Hagetmau. « Très rapidement, j’ai eu l’opportunité d’acquérir du foncier aux alentours et mon exploitation s’est vite développée, détaille-t-il. Aujourd’hui, elle fait 250 hectares, dont 175 ha de maïs dédié à la consommation animale. » Le reste de l’exploitation se compose d’environ 5,5 ha d’arbres fruitiers, principalement des pommiers (Royal Gala, Chantecler, Rubinette Fuji, Chantegrise…) et des kiwis.

A cela s’ajoute une parcelle de 40 ha réservée au maïs semence. « Depuis 2009, nous sommes sous-contrat avec des semenciers, qui nous fournissent des plants de maïs mâles et femelles, explique-t-il. En clair, nous sommes chargés de la multiplication des semences selon un cahier des charges strict et précis. » Mise en culture, obtention des grains, récolte : ce travail requiert beaucoup de main d’œuvre – jusqu’à 40 saisonniers – car il faut déflorer certains plants à la main, pour créer de nouvelles variétés.

Agriculture raisonnée

 

Soucieux de l’environnement, Loïc Destaillats travaille la terre à sa façon. Pas de labourage comme autrefois, ni de pesticides à tout-va. Depuis deux ans, il teste le semis direct sous couvert végétal. Une méthode naturelle – appelée agriculture de conservation – qui ne déstructure pas la qualité du sol et permet à la terre de se régénérer plus rapidement. « Nous pratiquons également le défeuillage sur place, ce qui génère de la matière organique, et ce compost naturel nourrit nos arbres fruitiers. »

Pour soutenir cette agriculture raisonnée, Loïc Destaillats a pu compter sur le Crédit Agricole Aquitaine, qui l’a suivi dès son installation. « La banque mutualiste m’a aidé dans l’acquisition du foncier puis dans le développement de mon activité, en finançant l’achat de machine-outils adaptées à la taille de mon exploitation, reconnaît-il. Cette année, le Crédit Agricole Aquitaine est encore à mes côtés pour financer la construction d’un séchoir pour le maïs et l’acquisition d’une chambre froide, en vue d’améliorer la qualité de conservation des fruits ainsi que leur stockage jusqu’à leur commercialisation. »

Sur l’exploitation, la femme de Loïc tient un magasin de vente en direct. On y retrouve les pommes, les kiwis, mais aussi du jus de pommes fermier, issu de différentes variétés. « Mes parents avaient l’habitude d’en produire, et nous avons décidé de relancer l’activité l’an dernier. » En quelques semaines, Loïc Destaillats a écoulé ses 1 300 bouteilles, et il vise les 3 000 bouteilles pour le cru 2020-2021 !

Un homme du cru

Situé au pied du village de Saint-Emilion, entre les célèbres châteaux Angelus et Quintus, il est une propriété viticole discrète, qui depuis 5 générations, s’attache à créer des vins gourmands et fruités. Cette propriété, c’est celle de Bruno Bertrand, viticulteur passionné et amoureux fou de son terroir. Portrait d’un homme qui travaille la vigne comme autrefois, dans le pur respect des traditions.

Comme le célèbre héros de bande-dessinée, Bruno Bertrand est tombé dans la marmite depuis qu’il est tout petit. Ou plutôt dans la barrique ! Avec ses deux sœurs, Catherine et Anne-Marie, ce viticulteur est à la tête des vignobles Jacques Bertrand.  Un domaine familial d’environ 23 hectares, posé sur le célèbre côteau Sud-Ouest de Saint-Emilion. A quelques ceps de vignes de là, règnent les grands crus classés Angelus et Quintus, rien que ça !
Depuis 1850, la famille Bertrand cultive cette terre d’excellence, où s’épanouissent pleinement les cépages de merlot, cabernet franc et cabernet sauvignon. 5 générations de vignerons passionnés, dont Bruno Bertrand, 49 ans, enfant du cru. « Cette terre m’a vu naître et grandir ! C’est ici que j’ai appris à marcher. C’est ici aussi que j’ai vu mon père tailler la vigne pour la première fois, confie-t-il. Une révélation qui deviendra vite une vocation. Bien décidé à prendre la relève de son père, Bruno Bertrand apprend les techniques de vinification, passe un diplôme universitaire d’aptitude à la dégustation (DUAD) et travaille sans relâche aux chais. Aujourd’hui, il supervise toutes les vendanges, jusqu’à la mise en barrique, dans les quelque 400 fûts de chêne.

Une culture raisonnée de la vigne

Elevage, soutirage, assemblage, mise en bouteille : tout est fait au château, dans la pure tradition familiale. « Nos vins Carteau, Franc Pipeau et Vieux Lescours reflètent les valeurs de partage et de convivialité qui règnent sur le vignoble. Avec mon père et mes deux sœurs, on essaie de travailler de la plus jolie des façons, en respectant notre sol si précieux, aux mélanges subtils de grave, de sable et d’argilo-calcaire. » Cette culture raisonnée de la vigne, respectueuse de l’environnement, est désormais reconnue, puisque le vignoble est labellisé haute valeur environnementale (HVE) niveau 3. Guidé par l’amour du terroir, Bruno Bertrand bichonne chaque pied de vigne, de la taille à la récolte, en veillant à aérer chaque grappe pour limiter les maladies comme le mildiou. Mais cette technique « du tout main » demande une main d’œuvre qualifiée. Très rare par les temps qui courent. « Impossible de mécaniser, Saint-Emilion a une densité de plantation très élevée, jusqu’à 7000 pieds par hectare ! souligne Bruno Bertrand. C’est vraiment un métier exigeant, qui demande une persévérance sans faille et une certaine abnégation. »

Si vous aimez la routine, oubliez la vigne !  

A cette main d’œuvre pénurique, s’ajoute un autre aléa, climatique celui-ci. La grêle comme le gel peuvent en effet compromettre les récoltes, anéantissant d’un coup de tonnerre, le travail d’une année. « Si vous aimez la routine, ne travaillez pas dans les vignes ! Comme l’amour, le vin réserve bien des surprises et rien n’est jamais acquis avec lui. » De la vigne au verre, il y a tout un travail de création, où le vigneron va distiller sa personnalité. »

Massifs, fruités, gourmands, les vins de Bruno Bertrand ont séduit les particuliers depuis de nombreuses années.  Il ont également trouvé de beaux accords commerciaux avec des cavistes et semi-grossistes, en France mais aussi à l’export, puisque 50 % de la production part au Benelux, en Angleterre, en Allemagne et aux États-Unis. Administrateur depuis une dizaine d’années à la caisse locale du Crédit Agricole de Saint-Emilion, Bruno Bertrand reste toutefois attentif aux évolutions du marché et s’interroge sur le devenir de la profession.

Un rêve de gosse

Très impliqué au niveau local, Bruno Bertrand est également administrateur au Conseil des vins de Saint-Emilion. Mais surtout membre de la Jurade de Saint-Emilion, confrérie qui défend les vins de la région et assure leur renommée à travers le monde. Un rêve de gosse devenu réalité. « Petit, je rêvais de porter cette longue robe rouge ! L’adoubement, par cette grande famille, reste l’un de mes plus beaux souvenirs.  Et je suis fier aujourd’hui d’être jurat et de perpétuer les traditions et les valeurs de notre terroir. » A Saint-Emilion, toujours fidèle* !

*devise de la Jurade