Le secteur de la restauration reste sur sa faim…

Julien Kunika, gérant de 4 restaurants bordelais * et consultant en développement d’unités de restauration, revient sur la crise qui a frappé de plein fouet la profession. La reprise demeure poussive et de nouvelles tendances de consommation semblent émerger pour la pause déjeuner…

15 jours après la réouverture des restaurants, quelle est la tendance ?


Il y a bien un certain engouement, et les terrasses sont prises d’assaut lorsque la météo est clémente. En revanche, la clientèle déserte les salles intérieures, par peur du virus. En outre, les restrictions sanitaires drastiques réduisent considérablement notre capacité d’accueil et viennent entamer notre chiffre d’affaires de 30 à 40 % en moyenne.

 

Justement, quel protocole sanitaire avez-vous mis en place pour accueillir la clientèle ?

Nous avons suivi à la lettre le protocole gouvernemental, avec la mise à disposition de masques et de gel hydroalcoolique pour notre clientèle. Côté cuisine, les équipes nettoient régulièrement toutes les surfaces de préparation et de cuisson, se lavent les mains toutes les 30 minutes et portent obligatoirement un masque. Même protocole strict pour les toilettes, avec une occurrence de nettoyage toutes les 2 heures. Afin de mettre en place ce protocole, tous mes responsables d’exploitation ont suivi une formation en ligne, organisée par la médecine du Travail, en collaboration avec l’UMIH. L’occasion pour eux d’apprendre les bons gestes, de connaître les bonnes pratiques et de lever un certain nombre d’interrogations.

Quel sentiment vous anime suite à cette réouverture ?


Très honnêtement, nous étions tous contents de redonner vie à nos établissements, mais force est de constater que la consommation n’est pas au rendez-vous. Aller au restaurant, c’est avant tout partager un moment de convivialité en famille, entre amis. Là, nos serveurs sont masqués, la clientèle doit également se déplacer à sa table en portant un masque. On perd beaucoup en spontanéité, et le protocole sanitaire va à l’encontre de cet art de vivre à la française. Cela soulève également de nombreux paradoxes : pourquoi est-il interdit de consommer debout, au comptoir, alors qu’il est possible de voyager dans un métro bondé ? Ces règles iniques portent préjudice à toute notre profession, qui représente 200 000 entreprises, et 2 millions de salariés.

Justement, le métier de restaurateur opère-t-il une mutation ?

Clairement, on observe une désertification des espaces de restauration sur la pause méridienne. Cette nouvelle tendance s’est imposée lors du confinement, où nombre de familles et de salariés déjeunaient chez eux ou se faisaient livrer. Aujourd’hui, on note une forte progression du « take away » le midi. C’est une autre façon de vivre sa pause déjeuner, à l’anglo saxonne, en se restaurant au bureau, au sein de son entreprise. La restauration plaisir est désormais réservée aux soirs et aux week-ends.

Que retiendrez-vous de la gestion de cette crise sanitaire ?

La profession a été durement malmenée tout au long du confinement, et nous avons souffert de décisions prises à la hâte. La fermeture administrative nous a été imposée un samedi soir à 19H30. Nombre de restaurateurs ont dû liquider leur stock en urgence, sans parler des annulations du dimanche. Avec un peu d’anticipation, nous aurions pu nous organiser et prévoir en conséquence. Même cas d’école avec le protocole sanitaire, qui nous a été révélé quelques jours avant la réouverture du 11 juin. On assiste à un véritable cafouillage gouvernemental, et je crains fort que la gestion de cette crise n’entraîne tout un effondrement de notre profession, avec des licenciements et des faillites en cascade.

Des mesures insuffisantes, selon vous ?

Insuffisantes et inadaptées. Aujourd’hui les restaurateurs peuvent prétendre au chômage partiel et au PGE. Pour ma part, j’ai eu de la chance, car j’ai pu bénéficier d’un PGE de 300.000 euros auprès du Crédit Agricole Aquitaine, avec une rapide d’exécution en 24 heures. Je regrette simplement que la perte d’exploitation ne soit pas prise en charge par les assurances. Si chacun avait pris sa part de responsabilité, la profession serait moins affaiblie. Il suffisait pour cela d’une participation des assureurs à hauteur de 10 à 15% pour couvrir les frais fixes. D’un geste des bailleurs afin de geler les loyers, avec – pourquoi pas ? – un crédit d’impôt à la clé.

Au lieu de cela, la profession s’est retrouvée seule à tout assumer. Aujourd’hui, je fais face à un vrai casse-tête chinois, et l’un de mes restaurants demeure fermé, car sa réouverture pèserait trop lourd au niveau des charges fixes et salariales. A se demander si le protocole sanitaire ne va pas créer plus de morts (économiques) que le Covid ? Selon les dernières estimations, 30 à 40 % des restaurants risquent de disparaître, et jusqu’à 70 % si on nous laisse au bord de la route.

Comment voyez-vous demain ?

Difficile de se prononcer. Je crains une deuxième vague avec l’ouverture trop rapide des frontières. Alors pour la première fois de ma vie, j’envisage de changer de métier. Un vrai crève-cœur, car ce sont mes grands-parents qui m’ont transmis cet amour du goût et du bon. A 15 ans, j’étais plongeur, et je suis passé par tous les postes, avant d’ouvrir en 2001 mon premier restaurant. On verra bien…

* Le Life, Le Reservoir, Le French Bistro , Le Floor,

Année noire pour les clochettes blanches…

Jacques Dubern, producteur de muguet à Martillac (33) se souviendra longtemps de l’année 2020… A 74 ans, il espérait prendre enfin une retraite bien méritée. C’était sans compter sur le Covid-19 qui a contrecarré ses plans…

L’année 2020 s’annonçait sous les meilleures auspices pour les producteurs de muguet. L’excellente météo du mois de mars laissait présager une récolte précoce et exceptionnelle. Avant que ne survienne le coup de massue. Face à la pandémie, les fleuristes, comme les autres magasins, ont fait les frais d’une fermeture administrative. Pire, la crise sanitaire a interdit la traditionnelle vente à la sauvette du 1er mai, les brins porte-bonheur ne pouvant être vendus que dans les boulangeries, ou les bureaux de tabac… Un vrai désastre, car chaque année, les petites clochettes représentent un chiffre d’affaires officiel de 20 à 30 millions d’euros par an*.

Producteur de muguet depuis 1958


Pour Jacques Dubern, 74 ans, la pilule a du mal à passer. Lui qui pensait prendre une retraite bien méritée après cette ultime récolte, se voit confronté à une crise inédite. Du jamais vu en 60 ans de carrière. « Chez nous, cultiver le muguet est une tradition familiale que l’on perpétue depuis 1958, date à laquelle mes grands-parents ont vendu leurs brins au marché aux fleurs à Paris. Aujourd’hui, je dispose d’environ 2 hectares de muguet de Hollande, une variété très productive. » Une variété exigeante aussi, car le muguet ne donne des clochettes qu’au bout de 2 ans, et demande beaucoup de main d’œuvre pour la préparation des plants, la plantation brin par brin tous les 6 cm ou encore la récolte…

Pas une seule commande au 15 avril…

Malgré les incertitudes liées au covid-19, Jacques Dubern a tenu à préparer ses serres afin de protéger les brins de la gelée et du soleil. « Au 15 avril, sur la centaine de clients, principalement des fleuristes et des grossistes, je n’avais pas une seule commande, se souvient-il. Les serres croulaient sous les clochettes, et les 3/4 des brins sont restés sur pied, faute de circuits de vente. » Au final, le producteur n’a cueilli que 20 % de sa production, en faisant appel à une main d’œuvre de proximité, principalement des personnes qui souhaitaient travailler pendant le confinement…

6.000 bouquets vendus


En plein marasme sanitaire,  Jacques Dubern a tout de même reçu le soutien du Crédit Agricole Aquitaine qui lui a acheté du muguet dans le cadre de son opération solidaire « Un brin de bonheur pour notre territoire ». « Ce dispositif a permis de sauver une partie de la production puisque, j’ai pu vendre 6.000 pots et bouquets, pour un chiffre d’affaires d’environ 10.000 €, , confie Jacques Dubern. Alors, oui, la démarche du Crédit Agricole Aquitaine a été une vraie bouffée d’oxygène, mais soyons clair, j’évalue mes pertes de chiffre d’affaires à plus de 100.000 €. »
Cette année, le muguet n’aura donc pas porté bonheur aux producteurs et aux fleuristes, comme le veut la tradition… Pour la petite anecdote, cette coutume remonte à la Renaissance : le 1er mai 1561, le roi Charles IX a décidé d’offrir aux dames de la cour quelques brins de muguet, symbole du printemps chez les Celtes. La tradition venait de naître…

* selon la fédération des maraîchers nantais, une région où pousse plus de 80 % du muguet vendu en France. En incluant les vendeurs à la sauvette, le marché du muguet est estimé à plus de 100 millions d’euros.

Face à la crise, Garg’Antoine passe au e-commerce !

Même si l’activité de son comptoir gourmand Garg’Antoine (restauration, épicerie fine) a été profondément impactée par ces deux mois de confinement, Antoine Augeard tient à rester positif. En s’adaptant rapidement au nouveau contexte, il a même développé certains pans de son activité.

Vous êtes installé au cœur des Halles gourmandes de Bacalan : qu’a signifié le confinement pour votre activité ?

Au début, il y a eu des incertitudes quant au statut de marché des halles de Bacalan.  Finalement, nous sommes restés ouverts en tant que surface alimentaire, tout en réduisant les horaires d’ouverture. En temps normal, 70 % de notre activité provient de la restauration, qui s’est arrêtée net du jour au lendemain. Il a fallu rebondir ! L’épicerie fine (charcuterie, fromages…) qui représentait jusqu’à présent une activité minoritaire, a servi de levier, et nous avons mis en place des solutions pour la développer et servir au mieux nos clients.

Un exemple ?

Afin de limiter les risques de propagation du virus, nous avons rapidement mis en œuvre un protocole sanitaire très strict (gants, masques, gel…). Nous avons également élaboré un circuit unique dans les halles pour limiter les croisements. C’était rassurant pour nos clients et pour nous aussi.
Autre mesure : avec les autres commerçants des Halles, nous avons développé une offre de commerce en ligne sur le site ollca.com. Pourquoi Ollca ? C’est tout simplement l’anagramme de Local ! Ce site simplifie l’accès à tous nos produits gourmands et favorise les circuits courts, en replaçant les commerçants de quartier au cœur de la ville. Très simplement, le client passe sa commande en ligne. Ensuite il peut venir la récupérer en mode drive sans contact ou se faire livrer dans un rayon de 7 kms via des coursiers à vélo. Aujourd’hui, cela génère environ 15% de mon chiffre d’affaires.

A combien évaluez-vous l’impact du confinement sur votre chiffre d’affaires ?

Cela représente une perte de 50 à 55 % , mais je m’estime finalement assez chanceux car à l’origine 70 % de notre activité provient de la restauration… Nous avons su limiter la casse, en développant la vente à emporter, et c’est vraiment positif !  Cela signifie également que notre clientèle continue à nous faire confiance, et que nous gagnons même de nouveaux clients grâce au site !Tout cela représente une note d’espoir. D’autant que l’on sait qu’à un moment l’activité finira par reprendre.

Pour un entrepreneur, les revenus sont impactés. Comment vous adaptez-vous ?

On serre les dents, on garde le positif et on réagit dans l’urgence, en tenant compte de toutes les mesures annoncées par l’état. L’une des plus utiles, pour une petite structure comme la nôtre, a été le recours au chômage partiel. Normalement j’emploie deux personnes à Bordeaux, en ce moment je suis seul. Bien entendu, en cette période j’ai fait une croix sur mon salaire. L’activité doit simplement me permettre de garder le contact avec les clients tout en payant le loyer, les charges et les fournisseurs.

L’autre mesure phare mise en place pour aider les entreprises à traverser la crise a été le Prêt Garanti par l’Etat ? L’avez-vous sollicité ?

Au début, j’avais un peu de trésorerie d’avance mais je m’étais tout de même renseigné auprès de mon conseiller bancaire du Crédit Agricole Aquitaine. Après un mois d’activité réduite, j’ai opté pour un PGE afin de ne pas impacter mes salariés et fournisseurs. Tout s’est fait en ligne de manière simple et rapide. J’ai fourni un plan de trésorerie et en moins d’une semaine j’avais les fonds sur le compte.

Aujourd’hui quel est votre état d’esprit ?

Il faut rester positif, même si on se dit que le plus dur est peut-être à venir car le déconfinement reste très progressif. A Bacalan nous travaillons beaucoup avec les touristes de la Cité du vin qui seront rares ces prochaines semaines, ainsi qu’avec les salariés des entreprises voisines dont bon nombre vont poursuivre le télétravail. Cette incertitude reste le plus dur à gérer. L’idée est de s’adapter au jour au jour, de prendre le meilleur et de chercher de nouveaux leviers de croissance,  comme le e-commerce que nous allons encore développer avec un site dédié.

*Garg’Antoine est présent aux Halles de Bacalan (33) et aux Halles de Pau (64).

 

L’avenir n’est pas ce qui va arriver, mais ce que nous allons en faire…

Denis Coret, dirigeant de la PME régionale REP, a toujours intégré la « constante du risque » dans son business model. Pour ce chef d’entreprise, la pandémie demande à repenser notre modèle, vers une économie du mieux, plus frugale. Interview.

En 2005, vous avez racheté la société REP, alors en grande difficulté… Aujourd’hui, la société emploie 35 personnes et réalise 4 millions de chiffre d’affaires. Comment avez-vous réussi à transformer l’essai ?

Par expérience vécue, je sais que tout peut basculer du jour au lendemain, et qu’il n’existe rien de constant, si ce n’est le changement. Après un très grave accident de la route à 25 ans, j’ai dû tout réapprendre. Ma renaissance est aussi associée au rachat de l’entreprise REP, alors en très grande difficulté financière. Comme moi, elle se trouvait « en sursis », n’ayant pas su et pu négocier le virage de la fin des entreprises « métiers » au profit des Business Units. J’y ai vu comme un défi et une opportunité. Dès l’origine, j’ai intégré « la constante du risque et de l’échec » dans ma stratégie, en réfléchissant à diversifier la typologie de clients et à développer la proposition de valeurs, afin de minimiser le risque. Aujourd’hui, REP travaille aussi bien pour les professionnels que les particuliers, et dispose de 3 cœurs de métiers : le nettoyage industriel, les travaux environnementaux ainsi que l’installation et la maintenance de chauffage/ventilation/climatisation. J’ai également misé sur la qualité de service, en m’inspirant des bonnes pratiques des grands groupes. Il me semble essentiel de parler le même langage et d’adopter les mêmes codes dans nos modèles économiques. Bien que simple PME régionale, l’entreprise REP est l’une des premières PME à avoir été certifiée ISO 9001 et ISO 14000  il y a plus de 15 ans. Désormais, nous sommes investis dans une démarche RSE au travers du World Compact ACT et nous avons obtenu l’habilitation sécurité Mase.

Quel regard portez-vous sur cette crise ?

Le 21e siècle est et sera celui de « l’incertitude », et nous sommes aujourd’hui condamnés à vivre dans un environnement volatil et complexe, fondé sur des cycles. Je vois cette crise sanitaire comme « un crash test » pour les entreprises, amenant de vrais questionnements. Mon organisation est-elle adaptée et résiliente ? Puis-je rebondir facilement ? Cette crise nous pousse dans nos retranchements, et nous invite à une véritable introspection personnelle, sans orgueil ni préjugés. L’entreprise est semblable à un satellite qui tourne autour de la planète « économie ». Seule la vitesse maintient son cap, sinon, elle s’effondre. Le confinement a coupé les moteurs, mais d’autres forces invisibles sont alors entrées en action, pour rendre possible l’impensable : le courage, le désir d’entreprendre, l’exemplarité des collaborateurs, la solidarité des clients et celles des fournisseurs…

Que vous a appris ce « grand confinement » ?


La crise sanitaire a magistralement démontré que les métiers utiles sont souvent dévalorisés, parfois même méprisés. C’est un véritable paradoxe !  Or dans la vie, tout est interconnecté : il est temps de remettre en avant ces métiers jusqu’alors décriés, et pourtant essentiels à la bonne marche de la société.

Quelles mesures avez-vous adoptées pour faire face ?

Immédiatement et d’un commun accord, j’ai demandé à mes collaborateurs de  mobiliser leurs congés payés et leur RTT en mars, avant de passer en activité partielle. Dès avril, nous avons organisé des visio-conférences, des WhatsApp qui ont permis de se tisser de nouveaux liens entre les collègues. Comme si, du jour au lendemain, on se redécouvrait sous un nouvel angle, plus humain et amical. Parallèlement, nous avons redémarré quelques petits chantiers assez facilement puisque nous disposions de combinaisons masques et gants, et que nous appliquions déjà des process de sécurité très poussés pour travailler dans des environnements techniques et complexes. Une semaine avant le déconfinement nous avons récupéré 100% de nos chantiers et aujourd’hui, nous tournons à 120%, avec un carnet de commandes plein au moins jusqu’en septembre. Durant cette période de flottement, le Crédit Agricole Aquitaine nous a soutenu et accompagné, notamment grâce aux reports de charges  et la mise en place d’un PGE pour  organiser la reprise.

Quelles est votre vision de l’avenir ?


Nous vivons dans un monde nihiliste, fondé sur un modèle court-termiste, avec de surcroît, une ultra-financialisation de notre planète. Au nom de l’argent roi, les GAFA défient les Etats et se soustraient de tout. Nous devons mettre un peu plus de justesse et de justice dans l’économie. Les paradigmes de l’entreprise changent, et il nous faut créer de la valeur, (re) donner du sens à des métiers qui n’en avaient plus… Si l’on ne prend pas la peine de s’interroger et que l’on repart comme avant, on fonce droit dans les murs démographique, énergétique, écologique et économique puis social et politique, avec à la clé l’enjeu de notre liberté… Nous devons retrouver une sagesse planétaire, l’humilité et vivre avec davantage de frugalité car les crises vont s’accélérer et s’intensifier. Pour s’adapter à cet environnement incertain, les entreprises doivent pouvoir réduire la voilure facilement, avec des structures plus légères, souples, agiles et suffisamment capitalisés. Pour le reste je cite souvent Bergson  : « l’avenir n’est pas ce qui va arriver, mais ce que nous allons faire »…

Face à la crise, le château maintient sa garde

Classé monument historique, le Château Royal de Cazeneuve, à Préchac près de Bazas (33), fut l’illustre demeure du roi Henri IV et de la reine Margot. Appartenant à la même famille depuis le 11e siècle, ce château a vécu mille tourments historiques, sans jamais perdre de sa superbe. Si la récente pandémie ébranle quelques certitudes, elle ne peut détruire 10 siècles d’Histoire. Louis de Sabran-Pontevès en est convaincu, et fait le pari de l’investissement, afin de rendre son château accessible aux personnes à mobilité réduite.

Posé dans un écrin arboré de 40 hectares, le Château Royal de Cazeneuve est un bijou gravé dans les arcanes de l’Histoire de France. Appartenant à la lignée des Ducs d’Albret depuis le 11e siècle, ce monument historique (2 étoiles au guide vert Michelin) accueille chaque année, plus de 50.000 visiteurs, en individuel ou en groupe, dont 50 % de clientèle internationale. « Principalement des croisiéristes américains, qui se délectent des petites anecdotes royales », souligne Louis de Sabran-Pontevès, le maître des lieux. Ainsi, au détour d’un couloir, on apprend que l’infidèle Reine Margot allait rejoindre ses amants à la Grotte de la Reine, en empruntant un passage secret depuis les douves du Château  ! Ou encore qu’une certaine Charlotte-Rose de Caumont La Force, née au château sous Louis XIV, a publié de nombreux contes… dont « Persinette» qui a inspiré les frères Grimm, et qui est aujourd’hui une héroïne Disney : Raiponce !

Pandémie et inondations : la double peine


Magnifique rénové et décoré avec du mobilier d’époque, le château s’apprêtait à rouvrir ses portes à Pâques, avant que la pandémie ne vienne stopper net l’activité. Frappé par une fermeture administrative au titre de Musée et Monuments historiques, l’immense demeure de 4500 m2 s’est figée dans le temps, laissant les propriétaires et les 3 salariés dans une incertitude palpable. D’autant qu’un autre coup dur allait frapper le parc classé Natura 2000, sinistré par les récentes inondations du 10 mai. « Malgré cette double peine, nous avons décidé de conserver l’intégralité de notre personnel, sans jamais recourir au chômage partiel, confie Louis de Sabran-Pontevès. L’entretien du château requiert une attention quasi journalière, et les dégâts dans le parc ont demandé un surcroît de travail. Quant à notre guide, elle a suivi une formation en communication (réseaux sociaux, notamment) pour maintenir le lien avec les visiteurs et gagner en visibilité. »

Y aura-t-il des visiteurs ?


Pour faire face à la crise, Louis de Sabran-Pontevès, ancien Responsable du Marché Haut de Gamme LCL de Gironde, s’est naturellement rapproché du Crédit Agricole Aquitaine pour demander notamment un report des échéances de crédit. Le Prêt Garanti par l’Etat ? Après mûres réflexions, il a finalement renoncé à cette aide, disposant encore d’une trésorerie de sécurité suffisante. Mais jusqu’à quand ? C’est la question qui le taraude le plus. « Aujourd’hui, je dois tirer un trait sur 50 % de mon chiffre d’affaires car la clientèle internationale ne sera pas au rendez-vous cette année.  A la réouverture le 30 mai (le Château a reçu un arrêté Préfectoral d’ouverture signé par la Préfète de Gironde), y aura-t-il des visiteurs ? Aujourd’hui, le plan de sauvetage du tourisme prévoit une annulation des charges, mais rien pour inciter les Français à découvrir la France et ses belles régions ; aucun plan de communication, aucune visibilité… »

Vers un tourisme lent et durable


Reste à espérer que les vacanciers joueront le jeu cet été, en privilégiant des destinations « près de chez soi », moins exotiques certes, mais toutes aussi dépaysantes. Ce retour au tourisme lent, local, durable et responsable, permettrait au secteur du tourisme de relever un peu la tête. « Nous avons déjà tout prévu pour accueillir les premiers visiteurs début juin, souligne Louis de Sabran-Pontevès. « Les normes de sécurité imposées s’avèrent drastiques, avec port du masque obligatoire lors des visites, mise à disposition de gel hydroalcoolique, nettoyage des lieux publics 3 fois par jour… »

Un investissement de 700.000 euros


Loin de baisser les bras, Louis de Sabran-Pontevès entend faire de cette contrainte une opportunité, et a même pris le pari d’investir ! « En 2020, nous avions pour projet la mise en accessibilité du château ainsi que la restauration d’une tour effondrée au 18E siècle. La crise sanitaire a freiné notre lancée, mais notre ambition demeure intacte, et nous allons faire appel au mécénat pour le financement. »  Banque familiale depuis de nombreuses années, le Crédit Agricole Aquitaine devrait également soutenir cet ambitieux projet de rénovation, dont l’investissement global est estimé à 700.000 euros. En attendant, la famille attend de pied ferme les premiers visiteurs, dans ce joyau des Ducs d’Albret, où la petite histoire se mêle souvent à la grande !

Pour faire un don : www.chateaudecazeneuve.com

La solidarité commence tout près de chez vous !

Face à l’isolement social lié au confinement, les Caisses régionales du Crédit Agricole ont lancé début avril la plateforme collaborative « J’aime mon territoire by CA ». Une initiative solidaire, qui renforce les liens entre les personnes et favorise localement les échanges. Le Crédit Agricole Aquitaine soutient ce dispositif 100 % coopératif.

Solidarité et système D : depuis la crise sanitaire et économique liée au covid-19, les Français s’organisent et créent de nouvelles formes d’échanges pour rompre la solitude du confinement et renforcer le lien social. Lancée le 9 avril dernier par les Caisses régionales, la plateforme J’aime mon territoire by ca vise à favoriser l’entraide entre voisins et à maintenir le contact entre les personnes. Chacun a la possibilité de demander de l’aide ou de proposer ses services, dans le respect des mesures de confinement.

Maintenir le lien social, promouvoir les services

Disponible sur ordinateur, tablette ou téléphone mobile, ce site collaboratif est également une formidable vitrine pour tous les commerçants, producteurs locaux et associations, qui disposent de pages dédiées pour promouvoir leurs services ou faire connaître leurs actions : prestations de livraisons à domicile, cours de sport en ligne, services pour les plus fragiles…

La rubrique « Les Belles Histoires » se fait aussi écho des actions solidaires portées par des « super-héros locaux », tandis que l’onglet « ma Communauté » permet d’entrer en contact avec des utilisateurs, à proximité de son domicile. La plateforme permet aussi de publier des informations utiles et importantes à son réseau local, et diffuse régulièrement des informations générales sur le coronavirus et la crise sanitaire.

Avec cette nouvelle initiative solidaire, le Crédit Agricole poursuit son action d’utilité sociale et collective, et confirme le nouveau positionnement du groupe : « Agir chaque jour dans votre intérêt et celui de la société ».